Le Mont Blanc par la mer de Glace

Cet itinéraire est grandiose, et de grande ampleur (il représente plus de 30 km de long !), tout en restant techniquement facile. On s’y sent plus comme en expédition lointaine : la remontée de la mer de glace fait penser aux interminables approches des grands sommets des Andes ou de l’Himalaya. Les sommets mythiques du massif se dévoilent peu à peu, au cours de cette approche lente. Le Boss lui même n’apparaîtra finalement qu’au dernier moment, toujours caché par ses satellites, ce qui évite le découragement d’un sommet trop lointain.

Autre avantage non négligeable de cet itinéraire : il est très peu parcouru, et même désert, en fait, jusqu’au col du midi. C’est tellement rare dans le massif du Mont Blanc que cela mérite déjà le détour en tant que tel !!!

Le récit correspondant s’appelle « Un mont-blanc réussi« .

Massif : Mont-Blanc. Carte IGN TOP 25 « Saint Gervais les Bains – Massif du Mont-Blanc »  3531 ET.

Durée : l’itinéraire peut se parcourir en 3 à 6 jours selon votre préparation : si vous arrivez directement de la plaine et de votre vie ordinaire, prenez 5 jours tels que décrits ci-dessous, cela vous permettra de vous mettre en forme et de vous acclimater à l’altitude au fur et à mesure de la montée. Si vous avez fait des séjours en altitude et des dénivelées importantes dans les jours précédents, vous arriverez sans trop de mal à condenser les 4 premières journées en deux journées d’ascension (jusqu’à la nuit au col du Mont maudit). Il vous restera ensuite une journée pour aller au sommet et redescendre.

Accès : Aller à la gare de Chamonix (je pense que vous trouverez sans plus de précision !). Prendre le train du Montenvers.

Première journée : Montenvers (1900 m) – refuge du requin (2500 m)

Du Montenvers, suivre l’accès classique au refuge du requin : descendre sur la mer de glace par les échelles (attention, avec beaucoup de poids sur le dos ça n’est pas si facile !), remonter la mer de glace jusqu’aux barres rocheuses situées sous le refuge, et remonter les échelles qui donnent accès au refuge (fatigue garantie pour ce premier jour !).

Sa majesté la mer de glace

Deuxième journée : Refuge du requin (2500 m) – Glacier du géant (3000 m)

Du refuge, le meilleur cheminement pour traverser les séracs du géant est clairement lisible, prenez le temps de l’étudier avant de vous lancer, tout n’en ira que mieux ensuite. Ces dernières années le réchauffement climatique a beaucoup changé l’endroit : la portion de glacier située sous le petit rognon a entièrement fondu, laissant place à des bandes de rochers nus. Tout va bien, ils sont faciles à traverser. La dernière fois que j’y suis passé (août 2019) une bande de neige entre rocher et glacier constituait un passage très simple pour accéder au plateau glaciaire… A voir comment cela évoluera, mais il est probable que d’ici quelques années on pourra poser le pieds sur le plateau supérieur du glacier sans avoir mis le pied dans la neige depuis le refuge du Requin.

Reconnaissance vers les séracs du Géant

Une fois la barre de séracs passée, progressez à votre bon plaisir dans la « bédière », cette vaste cuvette neigeuse agréable et facile.

Remontez les pentes de neige un peu plus raides qui lui font suite et arrêtez-vous quand vous avez envie… et quand vous trouvez du terrain à peu près plat. C’est le cas par exemple vers 2950 au dessus d’un petit couloir de neige tranquille. Il est également possible de monter directement jusqu’au col du midi mais je conseille de faire une petite étape dans le coin, où on est encore tranquilles, et de dormir là pour commencer à s’acclimater tout doucement.

Troisième journée : Glacier du Géant (3000 m) – Col du Midi (3500 m)

Journée facile : remonter à vue les pentes de neige peu raides et s’installer ou on veut sur l’immense plateau neigeux du col du midi. Petite ascension digestive possible : la pointe Lachenal, toute proche et à 3650. Ceux qui font l’ascension en 3 jours continueront jusqu’au col du Mont Maudit.

Le camp du col du midi

Quatrième journée : Col du midi (3500 m) – Arête du Mont-Blanc du Tacul (4100 m).

On rejoint ici un tronçon d’itinéraire très fréquenté du massif : la voie normale du Mont-Blanc du Tacul, et la voie dite « des trois monts » vers le Mont Blanc. Vous pourrez vous contenter de suivre la trace, généralement bonne, pour rejoindre le col du Mont Maudit ou je vous conseille de poser le camp.

Camp au col du Mont Maudit

Attention, à 4100, il faut être correctement acclimaté pour bien dormir (jetez un œil sur l’article « L’altitude et ses effets« ). Vue grandiose sur les sommets italiens et les préalpes françaises. Possibilité d’aller faire l’ascension du Mont-Blanc du Tacul en petite balade (100 m de dénivelé !).

Du Tacul, le Mont-Blanc paraît encore bien loin

Cinquième journée. Arête du Tacul (4100 m) – Pointe Bayeux au dôme du goûter (4250 m).

La dernière partie de l’ascension se fait en suivant la voie classique de traversée des 3 Monts. Le passage de la rimaye du Mont Maudit (pente de glace un peu raide) avec 25 kilos sur le dos n’est pas de tout repos, d’autant qu’il y a généralement pas mal de monde.

Il est également possible de monter à gauche dans les pentes raides puis l’arête qui rejoignent le sommet du Mont Maudit. Là encore, le poids du sac ne facilite pas les choses, mais c’est faisable sans trop de problème. La redescente du Mont Maudit au col de la Brenva est facile.

La face nord du Mont Maudit, par lequel se fait la redescente vers le col de la Brenva. L’itinéraire le plus parcouru, dont les traces sont visibles sur la photo, passe par le centre de la face et la pente de neige qui coupe l’arête rocheuse de gauche. La variante par le sommet, à gauche, est un peu plus longue et engagée, mais magnifique.

Reste la dernière montée, classique, le mur de la côte et la face. C’est une section facile mais un peu long et monotone à mon goût.

Les corniches du col de la brenva

Si vous avez avancé tranquillement, peut-être arrivez-vous au somment largement après le départ des derniers ascensionnistes (vers 16 ou 17 heures, par exemple), ce qui permettra de profiter tranquillement.

La redescente peut se faire par la voie normale, ou les grands Mulets. La logique d’une traversée interminable pourrait faire choisir la voie normale italienne et le glacier de Miage (je n’ai jamais fait cet enchaînement à la descente).

Quelque soit votre choix il sera difficile de redescendre jusqu’à la civilisation dans cette même journée, aussi je vous donne un conseil : au dôme du goûter, filez plein nord sur un petit kilomètre vers la pointe Bayeux, replat neigeux à l’écart de l’itinéraire, à peine marqué au dessus d’une petite émergence de rocher et posez-y le camp. Ce sera une belle occasion de profiter d’une nuit de tranquillité en plus, dans une ambiance fantastique de très haute montagne…

Sixième journée : Pointe Bayeux au dôme du goûter (4250 m) – Redescente

RAS : emprunter l’itinéraire classique de descente de la voie normale du Mont-Blanc, ou la voie des grands Mulets, à vous de voir…

L’aiguille de Bionnassay, aperçue depuis la descente du Dôme du Goûter

Vous y passerez au matin, après que la caravane d’ascensionnistes seront passés dans le sens de la montée, avec un peu de chance vous serez tranquilles…

Le refuge du Goûter, sur son arête solitaire